Abstract:
A Paris comme à Milan, l’implantation des communautés catholiques d’origine chinoise, qui se sont développées tout au long du XXe siècle, a suivi le rythme des fluctuations de l’histoire migratoire du continent asiatique. Prenant la mesure de l’enjeu de l’accueil de ces nouveaux fidèles, les autorités ecclésiastiques françaises et italiennes ont mis en place un certain nombre de structures et de dispositifs particuliers. Ainsi, depuis les années 1950, chacune des villes offre aux croyants chinois des espaces liturgiques adaptés aux spécificités de leur culture religieuse. Pourtant le développement de ces communautés va être durablement influencé par la façon dont les institutions ecclésiastiques de chaque pays accompagnent la structuration de ces groupes de fidèles chinois.
D’un point de vue organisationnel, il convient de noter le manque d’homogénéité entre les différentes communautés catholiques chinoises en Europe. Malgré une pastorale spécifique mise en place par l’Église catholique à l’adresse des migrants, mes terrains de recherche m’ont montré que ces communautés se structuraient différemment en France et en Italie. Alors que dans l’Hexagone, la communauté se concentrait essentiellement dans la capitale, il s’avère qu’en Italie les pratiquants chinois se répartissent en une quinzaine de communautés structurées autour des principales villes du pays. Bien plus qu’une politique cohérente de « maillage spirituel » désirée par l’Église vis-à-vis de cette nouvelle communauté catholique que représentent les migrants chinois, ces différences organisationnelles sont en réalité assez révélatrices de l’évolution socio-historique de ces deux pays. L’origine et le parcours migratoires des membres de ces communautés présentent également des différences notables. Au sein des paroisses chinoises, on retrouve des fidèles originaires de la diaspora, arrivés en Europe après une première émigration vers un autre pays asiatique ou bien encore des Chinois ayant trouvé refuge à Taïwan suite à la prise de pouvoir du parti communiste en 1949 ; on note également la présence de Chinois originaires de Chine continentale disposant d’un référentiel culturel et linguistique différent qui complique fortement le travail des autorités religieuses (chinoises ou non) chargées de leur suivi spirituel.
Au cours de cette thèse, nous avons tenté d’analyser comment ces différents éléments allaient influencer la structuration des communautés étudiées, ainsi que leur fonctionnement. Plus particulièrement, nous nous sommes intéressés à la façon dont les différents parcours des fidèles chinois, dans leur hétérogénéité, impactent leur pratique rituelle du catholicisme. Nous avons également étudié le rôle que ces communautés catholiques jouent en termes de maintien du lien de ces migrants chinois avec leur pays d’origine et leur culture. Les motivations à la base de la pratique religieuse ont été aussi au cœur de notre travail. A ce sujet, si les conversions sur place ne manquent pas, force est de constater que la volonté spirituelle qui alimente la majorité de ces catholiques chinois est celle de continuer la pratique d’une religion transmise au sein de leur propre famille depuis le plus jeune âge.